Le salon Art3F se déroule à Lyon du 10 au 12 juin à la Halle Tony Garnier. Il propose de démocratiser l’art contemporain, en le sortant du musée et en proposant des œuvres à des prix « abordables ».
Dans son livre Nouvelle Géopolitique de l’Art contemporain, Aude de Kerros revient sur l’Histoire de l’Art du 20e siècle. Elle explique comment, dans les années 20, les bolcheviques ont décidé d’infiltrer les sphères culturelles et intellectuelles pour diffuser leurs idées révolutionnaires. Dès lors va se mettre en place une véritable guerre froide culturelle, comme l’a théorisé l’écrivain Georges Orwell. Adolphe Hitler va imposer l’Art nazi, un Art classique caricatural qu’il va opposer à l’Art contemporain qu’il qualifiait d’ »art dégénéré ». Dans le monde culturel, on va parler de guerre asymétrique. Après-guerre, les Américains vont prendre conscience qu’ils ont un train de retard dans cette guerre froide culturelle, la CIA va alors échafauder un plan : opposer l’Art progressiste défendu par les américains, à l’Art classique assimilé à Hitler et à Staline, qui rappelle l’obscurantisme et les heures les plus sombres.
À l’heure actuelle, le tableau le plus cher de l’Histoire reste le Savator Mundi attribué à Léonard de Vinci qui a été adjugé en novembre 2017, pour la modique somme de 450,3 millions de dollars, mais le 9 mai dernier, Shot Sage Blue Marilyn, un portrait de Maryilyn Monroe réalisé deux ans après la mort de cette icône américaine par Andy Warholl, s’est vendu en moins de 5 minutes pour une somme record de 195 millions d’euros, faisant de ce tableau, l’œuvre la plus chère de l’Histoire du 20e siècle. Il devance Les Femmes d’Alger (Version 0) de Pablo Picasso (vendu 179,4 millions de dollars en mai 2015) et le Nu couché d’Amedeo Modigliani, parti pour 170,4 millions de dollars aux enchères en novembre 2015).
Un salon populaire
Alors que les prix explosent, le salon Art3F qui se déroule à Lyon du 10 au 12 juin propose de démocratiser cet Art contemporain. « Un salon aujourd’hui ne doit plus être qu’un musée, ou réservé à des gens qui sont vraiment très fortunés, mais on doit pouvoir avoir un coup de cœur et repartir avec, ou alors simplement voire de belles choses. Il y a environ 3000 œuvres sur ce salon, donc il y a vraiment de quoi circuler dans les allés et puis surtout les artistes sont présents, les galeries aussi et on peut échanger discuter, c’est un salon qui se veut populaire et bon enfant », déclare Serge Beninca, le directeur du salon Art3F.
« On a tous les styles qui se mélangent. Il y a des styles qui ressortent un petit peu plus depuis deux ou trois ans… c’est le Pop Art qui revient en force parce que les gens ont envie de coloris, de flashy. On est quand même dans des périodes un peu sombres, un peu grises donc il faut égayer un peu son intérieur », ajoute-t-il.
C’est vrai que dans les différents stands du salon, on retrouve toutes les icônes de la culture pop. Serge Gainsbourg, Coluche, Jacques Brel, Steve Mcqueen, Michael Jordan, Maryline Monroe, Vincent Cassel dans La haine… On retrouve également les stars de l’Art contemporain comme Andy Warholl, Jean-Michel Basquiat, JR Ewing, ou Shepard Farey à qui l’ont doit les fameux Obey Giant ou l’affiche de la campagne d’Obama. Mais les artistes de Street Art, ne sont finalement pas si représentés que cela sur le salon. Pourtant ce style connait un grand succès dans le monde entier et particulièrement à Lyon qui compte de nombreuses associations comme Zoo Art Show, Superpositions, ou Mur 69 qui a organisé l’exposition Fresque dédiée aux éléments primaires sur quatre murs de la Croix-Rousse, y compris le Mur de la Place des Tapis.
« Cette année, il n’y a pas beaucoup de Street art, il n’y a pas une grosse représentation, il y a un casting qui est fait chaque année, et c’est en fonction des saisons, ça peut être plus ou moins représenté (…) C’est un peu le Hazard qui fait les choses et c’est en fonction du dépôt des dossiers », confirme M. Beninca.
Les stands et les artistes exposés

En déambulant dans les allées du salon, on tombe tout de même sur le stand de DASHONE, un artiste-peintre Marseillais issu du graffiti. « J’ai commencé le graff avec le mouvement hip-hop. J’étais trop réservé pour chanter, pas assez habile pour danser, mais je me suis mis à peindre. J’ai peint pendant 20 ans dans la rue et je suis dans un atelier depuis une dizaine d’années », explique-t-il. Depuis, il vend ces tableaux comme des petits pains et propose des bombes aérosol customisées qui sont abordables puisque DASHONE les affiches au prix de 90 euros.

On découvre également « Le petit monde de Claire Boris » des sculptures en ciment qui peuvent être exposées aussi bien en intérieur qu’en extérieur. « Je travaille sur l’arrêt d’un mouvement, d’une attitude et j’essaye de donner de la fluidité au ciment », affirme la sculptrice.

Le temps est également le thème préféré de Stéphanie Capelasse. Cet artiste utilise des pièces de récupération, pour la plupart des engrenages, mais également « des pièces de monnaie issues du porte-monnaie de sa grand-mère ». Autant de symboles « du temps qui passe ». Stéphanie Capelasse travaille également sur l’alchimie, mais ces œuvres ont surtout une coloration Steampunk.

Enfin, sur le stand Goldstein créations, une entreprise située à Spechbach-le-Bas, en Alsace, Laurent Barat propose de superbes pierres multicolores. Il s’agit en fait d’Arbres fossilisés, qui sont de véritables œuvres d’Art confectionnées par la nature. « En 1994, lors d’un voyage aux États-Unis, on a découvert qu’en Arizona, il y avait des arbres fossilisés. Il existait des objets en petites dimensions, mais on a souhaité proposer de grandes pièces. Il nous a fallu dix ans afin de développer des techniques de polissage propices à une matière qui est 4 à 5 fois plus dure que le granit ». Goldstein création propose ces coupes d’arbres pétrifiés -dont on distingue l’écorce sur le pourtour et ses cercles de vies en son centre- exposées telles quelles, ou transformées en mobilier.

Dans ce salon, nous avons rencontré Zohra qui paraissait particulièrement intéressée par les œuvres qu’elle découvrait. Elle apprécie spécialement les « sculptures et les peintures avec de la matière, les mélanges de bois et de pierre ». Elle se réjouissait de « pouvoir découvrir des œuvres en dehors d’un musée ».
Le salon Art3F fait la part belle à la décoration. Serge Beninca, confirme que cela concerne la grande majorité des œuvres exposées. « On a déjà eu un artiste qui s’appelle l’homme jaune qui est un peintre algérien recherché dans son pays, qui a des messages hyper fort, hyper puissant, certaines œuvres à la limite du montrable, mais c’est justement pour choquer et l’Art peut le faire aussi » ajoute-t-il.
Même s’il est le directeur d’un salon qui se veut populaire, Serge Beninca a bien conscience que « les œuvres d’art, on servit à toutes les époques, dans tous les mouvements » a « faire passer des messages ». Le Pop Art qui utilisait les codes de la publicité en dit long sur notre société de consommation par exemple.

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